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Un "dé-corps" qui parle d'une absence à venir
© Clastic Théâtre
Que signifie un tel rituel en de tels lieux et que produit une telle artificialisation du mouvement des objets ?
Les « hurlements » du titre renvoient à des cris étouffés, produits par des corps presque-déjà disparus : ceux d’une population subissant de plein fouet la crise économique. L’animation immobile témoigne de l’état de suspens entre l’effective présence ouvrière dans l’usine et la vision d’une disparition imminente. La mise en théâtre de l’exposition des sculptures fonctionne sur le mode de la rature : elle laisse voir ce qui est déjà en cours de disparition. Elle met en mouvement, pour un court instant, ce qui est déjà immobile. L’absence de squelette des pantins, dont la bouche peinte s’efface, dit l’impossibilité de leur mouvement, attachés qu’ils sont sur leur chaise, lacérés par de multiples ficelles. L’animation de ces totems vient créer le temps du spectacle un soupçon de vie illusoire. Celui-ci, marqué du sceau de l’artifice, fonctionne comme une alerte : il rend sensibles des figures de « disparaissant·e·s ».
L’usine elle-même est mise en scène comme une survivante en sursis. On la visite à la tombée de la nuit à l’heure où aucun ouvrier n’y travaille et quand les machines sont à l’arrêt. La main du·de la manipulateur·trice disparaît du procédé d’animation comme la main ouvrière a disparu de ces lieux.
Les Hurlements bouleversent la conception de l’animation marionnettique car il s’y déploie des figures sans corps fixes, figures errant entre objets abandonnés. C’est le regard des spectateur·trice·s assemblé·e·s qui peuple cet espace hanté et qui invente le soubresaut éphémère de la matière. C’est dans le côtoiement clastique des corps en ruines et des immenses machines de métal, que s’entend alors, par friction, le hurlement d’un « S.O.S. », ce « premier mot de l’alphabet clastique » (2) inventé par Lazaro et Lemahieu.
(2) François LAZARO et Daniel LEMAHIEU, « Manifeste du théâtre clastique », 1996
Un "dé-corps" qui parle d'une absence à venir
© Clastic Théâtre
Que signifie un tel rituel en de tels lieux et que produit une telle artificialisation du mouvement des objets ?
Les « hurlements » du titre renvoient à des cris étouffés, produits par des corps presque-déjà disparus : ceux d’une population subissant de plein fouet la crise économique. L’animation immobile témoigne de l’état de suspens entre l’effective présence ouvrière dans l’usine et la vision d’une disparition imminente. La mise en théâtre de l’exposition des sculptures fonctionne sur le mode de la rature : elle laisse voir ce qui est déjà en cours de disparition. Elle met en mouvement, pour un court instant, ce qui est déjà immobile. L’absence de squelette des pantins, dont la bouche peinte s’efface, dit l’impossibilité de leur mouvement, attachés qu’ils sont sur leur chaise, lacérés par de multiples ficelles. L’animation de ces totems vient créer le temps du spectacle un soupçon de vie illusoire. Celui-ci, marqué du sceau de l’artifice, fonctionne comme une alerte : il rend sensibles des figures de « disparaissant·e·s ».
L’usine elle-même est mise en scène comme une survivante en sursis. On la visite à la tombée de la nuit à l’heure où aucun ouvrier n’y travaille et quand les machines sont à l’arrêt. La main du·de la manipulateur·trice disparaît du procédé d’animation comme la main ouvrière a disparu de ces lieux.
Les Hurlements bouleversent la conception de l’animation marionnettique car il s’y déploie des figures sans corps fixes, figures errant entre objets abandonnés. C’est le regard des spectateur·trice·s assemblé·e·s qui peuple cet espace hanté et qui invente le soubresaut éphémère de la matière. C’est dans le côtoiement clastique des corps en ruines et des immenses machines de métal, que s’entend alors, par friction, le hurlement d’un « S.O.S. », ce « premier mot de l’alphabet clastique » (2) inventé par Lazaro et Lemahieu.
(2) François LAZARO et Daniel LEMAHIEU, « Manifeste du théâtre clastique », 1996